ROMAIN HUMEAU

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(Scène Française)
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Biographie de Romain Humeau

Fils d'un facteur de clavecins et d'une flûtiste/décoratrice, il acquiert très vite une culture éclectique, madrigaux de Gesualdo, Monteverdi, Bach, Louis Armstrong, Beatles, Buzzcocks, Brel, Higelin, Cure, Depêche Mode, Kinks, Coltrane, Monk, Damon Albarn, Bowie, Pixies, Brian Wilson...
Il apprend le violon à six ans, la guitare puis la batterie, forme à treize ans son premier group (Peanuts) avec son ami d'enfance Philippe Uminski.
Puis au conservatoire de Toulouse, il étudie harmonie-contrepoint, composition, batterie, guitare, percussions, classes de jazz, histoire de l'art tout en écrivant ses chansons et montant divers groupes de rock avec lesquels il arpente clubs, bars de la ville rose et alentours.
Quand il gagne Paris en 1995 et forme Oobik & the Pucks avec Estelle (sa compagne) et le batteur Nicolas Courret, la première mouture du futur Eiffel est posée.
Eiffel, naissant des cendres d'Oobik, écrit depuis l'histoire d'un groupe qui de par sa structure et l'entente de ses quatre membres (Nicolas Bonnière les rejoint en 2008), semble fait pour durer, contre vents et marées, sans forcer, quand l'envie est là.... Et elle y est.
Mais Romain a toujours eu la franchise de dire qu'il n'écrivait ni pour Eiffel, ni pour lui même ni pour quelque projet concret que ce soit: il écrit.
Régulièrement. Qu'une chanson puisse en nourrir une autre. Jeter, garder, peu importe: chercher toujours. À l'instar de certains de ses pairs, il a la sensation qu'une chanson existe déjà dans l'air.
Papillon dont il aurait en charge la révélation.
Manière de vivre avec lui même, pour et avec les autres.
Inutile de lui demander « pourquoi Eiffel? » Ou pire, « pourquoi Romain Humeau? ». Il vous répondra: « à cause des mouches ».
Son originalité (attirant fans Ahuris, repoussant détracteurs), pourrait en partie se nicher dans une différence de langage harmonique: emprunt quasi systématique au polymodal sans occuper le premier plan, comme une bizarrerie, un trompe oreille ; ainsi qu'à une tension punk subliminale quelle que soit la direction musicale empruntée.
Tendu, oui, et suivant l'adage de Cocteau, c'est un défaut qu'il cultive.
Loin des travers virilo-heavy qu'il abhorre, ses héros de toujours étant Bowie, Albarn, Lennon/Mc Cartney, Franck Black et Brel, il cherche du côté féminin, une forme d'érotisme et transgenre sonore.
Un absolu, multi-dimensionnel et inaccessible. L'anti sédentarité musicale, le contre hook.
Prévert, Céline, Burrough, Yourcenar, Vian, Calaferte ou Teulé entre autres comme autant d'univers croisés. Quand ses chansons se meuvent en Eiffel, elles passent par le prisme de Nicolas Courret, Nicolas Bonnière et Estelle Humeau.
La matière première reste quasiment immuable, travaillée en éclatements pour un final centré.
En revanche, pour ses albums solo, il ne se fixe aucune limite d'utilisation instrumentale, une autre forme d'aventure...
Prenez Mousquetaire#1 (Marjane, Something I can't Touch, No one wins, Paris, Politkovskaïa) et « Vendredi ou les limbes du Pacifique », son adaptation musicale du roman de Michel Tournier (2), il prétend n'avoir rien fait et que tout est à venir.
Quand on aborde sa discographie, de l'album d'Oobik aux six d'Eiffel en passant par ses quatre albums solo, sans parler de ses multiples collaborations (3), il préfère causer d'un nouveau groupe à monter, du prochain Eiffel ou prochain solo, d'un recueil de poésies (« À tombeau ouvert ») ou d'un projet fou-rêvé avec son ami réalisateur Alexandre Plank (4).
De plus en plus à l'étroit dans les couloirs du business musical, il décide de monter un label avec Guillaume Sciota, son manager, et Estelle Humeau: Seed Bombs Music. Il s'y arrime en équipe.
Sainement et dans l'anti cynisme. Prise de risque optimum, il le sait, mais nécessaire pour que tous ses projets, dont Eiffel voient le jour. L'acte de naissance du label Seed Bombs Music est à ce titre explicite,: « permettre de sortir les disques pensés et désirés aux moments désirés en sortant des sentiers et plannings conventionnels, ainsi que des vieux principes offre-demande, création d'attente ».
Aussi heureux d'être dans son studio (Studio des Romanos) que sur scène (près de 700 concerts à son actif), en solo, avec Eiffel ou d'autres, il entrevoit le positif généré par la descente aux enfers de l'industrie du disque. Chemins et manières étant à réinventer.

MOUSQUETAIRE#2
L'idée « Mousquetaire » en deux volets n'étant pas de lui mais de son ancienne maison de disque (30 chansons devaient initialement sortir en même temps), il transforme Mousquetaire#2 en une suite plus acérée que prévue.
Plus dure et Hip Hop: « Chercher », « Nyppon Cheese Cake » en gardant ses élans Petit Prince: « Quixote », « Loveless », « Tram Track to the blue ».
Il se permet aussi ce dont il rêvait: écrire une Bamba (« Trop nul pour mourir ») et quelques brûlots punks Outkastiens (« Rob the robbers », « Tabloïds »).
La contrainte ayant façonné d'autres envies, il livre un deuxième volet foutraque, encore plus décomplexé et libre que le précédent.
Tout auditeur un peu sportif s'apercevra qu' étonnamment, tout convole en parfaite homogénéité. « In oleo Balneat ».
Un de ses maîtres mots étant de ne pas « se ressembler »..... Bien sûr, il y a la voix d'Eiffel, mais l'aventure proposée ne serait-ce que vocale est multiple: voix de tête, féminine ou enfantine, cassée et grave, claire et puissante, fragile et haletante... c'est selon. On est au cinéma.
Il y a comme du Walt Disney dans ce Mousquetaire#2....
D'un circacien « Do the math » (...Et je traîne mon fantôme...) écrit au matin des attentats contre « Charlie Hebdo », aux panics attack de « Nyppon Cheese Cake » (...si peu de vie pour tant de mort...), on circule d'écriture glacée et journalistique en tendresse-fleur bleue d'un Quixote héroïque (... j'allais où tu allais faire tes contes d'enfants...).
De l'acerbe « Tabloïds » (... le monde te sniffe comme cocaïne...) aux nuits dépravées « Naked lunch » (...autant en enfer, aller plus loin que le dessert...), on sent le besoin de se faire peur, de jouer dans le noir pour conjurer choses vécues, en revenant toujours à un bouton d'or: le Mitsoukien « Smartly Stupid » (... J'fais des nus artistiques avec Mona Lison...).
Comme si dans ses chansons, un rire enfantin et déluré (quelque peu sarcastique tout de même....) faisait constamment face à un monde d'ennui numérique et normalisé. La guerre des boutons 2017.
Luciole contre clic.
Là où certains sourds n'avaient entendu en Eiffel ou Romain qu'un nième rock français engagé et criard, la forte distanciation fond/forme dans l'écriture de Mousquetaire#2 devrait, si besoin est, remettre les mots à leur place.
Jeu d'acteur: Romain méchant, amoureux, salopard, benêt, truand, winner, mal aimé, femme, homme, transexuel (« Tryin' to be a girl) etc...
De Pasolini à Quick et Fluke.
Se permettant de brouiller les pistes en duo avec le rappeur bILLY bOY sur la moquerie « Rock the rockers » (sous perf Cibbo Matto/Gorillaz). Chanson dont le titre évoque à lui seul 70 années de trémoussement jerk , de « Rock your body » « Rock your baby » à « Rock the Casbah », « Rock the house » pour un retour à l'envoyeur: se gausser de lui même, rocker qu'il ne prétend pas être. On goûtera ici au flow de l'excellent bILLY bOY.
Et puis il y a « Chercher ». Texte fleuve. Beaucoup moins cryptique qu'une première écoute pourrait le laisser croire: un manifeste comme Romain peut en écrire (« Je m'obstine » d'Eiffel au récit musical d'un autre genre). La vieille question du sens (ou non sens) de la présence humaine dans l'univers....
On convoque l'influence Ferré (« Le conditionnel de variété », « Le chien »), une envie d'ouvrir grand les portes harmoniques et poétiques, de se « dépasser » (« S'enflammer » 2006). On pense aussi au « Locataire » de Polanski, film construit en ouvert-fermé comme la chanson « Chercher ». Où l'on croit avoir quitté la pièce pour d'autres galaxies, quand en toute fin, on se surprend à reconnaître le point initial. Et plus infime encore: « J'ai cherché.... dans les siècles-guerre où la mélodie de ce flot d'éternité tout petit que voilà. »
Poupées Russes, constructions d'Escher et nouvelles extraordinaires....
Avec « Mousquetaire#2 », peut-être est-ce à son insu mais de manière définitive que Romain Humeau s'affiche comme « artiste à prendre ou à laisser ».
Certains laisserons. Ceux qui prendront pourraient bien s'en amouracher à vie
Ça lui va toujours.

 

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